lundi 12 janvier 2009

Georges Le Bigot fonde Pathé-Overseas à Hong Kong

Aventurier touche-à-tout, passionné de musique et de cinéma, Georges Le Bigot est un personnage atypique et hors du commun. Après des années de péripéties asiatiques, il s’installe à Hong Kong dans les années 60 et fonde Pathé-Overseas, une entreprise cinématographique de distribution et de production.
Georges Le Bigot quitte la France en 1927. Engagé dans l’armée coloniale, les hasards d’une vie mouvementée l’amènent en Chine, à Tien Tsin, puis à Shanghai. Il est policier dans la concession française, bureaucrate au consulat ; ces métiers lui permettent de voir du pays, mais ne correspondent pas aux aspirations du turbulent personnage. Il retourne en France en 1935 pour flamber ses économies et faire un constat définitif : sa vie est en Asie.
De retour en Chine, il s’associe avec un Grec dénommé Castro et se lance dans une grande aventure : la création du Shanghaï Opera. L’affaire en plein essor est rapidement freinée par la guerre sino-japonaise. En 1939, il part à Saigon pour redonner vie à l’opéra de la capitale cochinchinoise : la guerre éclate alors et il est mobilisé. Réformé deux ans plus tard, le revoilà à Shanghai, toujours avec ses projets d’art lyrique… et la censure japonaise. Il se diversifie dans le cinéma, ouvre un restaurant et une boîte de nuit !
Avec l’arrivée de Mao au pouvoir, il quitte la Chine populaire. C’est bien évidemment à Hong Kong qu’on le retrouve. Il décide d’intensifier ses activités de distribution dans le 7e Art et passe à la production. Il voyage entre la France et la colonie britannique, point d’ancrage de sa nouvelle entreprise. «C’est Georges Le Bigot qui a essentiellement contribué à l’essor du cinéma japonais en France,» raconte Paul Clerc-Renaud, l’un de ses associés. Il achète alors les droits de films nippons pour les proposer au public français. Un pari culturel risqué et de longue haleine, qui repose sur la conviction et la passion.
Avec sa société Pathé-Overseas, Le Bigot acquiert également les droits de films français pour les diffuser en Asie. Son ancien collaborateur et ami se souvient, «il était connu partout par tout le monde… Il allait à Cannes pour faire ses courses de nouvelles productions et oeuvrait à leur diffusion en Asie». De 1977 à 1983, Paul Clerc-Renaud seconde l’homme d’affaire depuis ses bureaux de l’International building. «C’était une fonction à temps partiel puisque ma fonction principale était de diriger Saca Far East, société de commerce actionnaire de Pathé Overseas avec Georges». Le producteur hongkongais Fred Wang, de la compagnie Salon Film, se souvient avec émotion d’un très bon ami : «Nos collaborations ont été très nombreuses ! Nous faisions appel à nos services respectifs presque systématiquement pour les productions françaises».
A Hong Kong, l’un des plaisirs de Georges Le Bigot est de recevoir des artistes pour le lancement des films. «Lino Ventura, Delphine Seyrig, Pierre Richard et bien d’autres encore sont passés ici pour des tournées de promotion, souligne Paul Clerc-Renaud. Pierre Richard était une véritable star à Hong Kong à la fin des années 70… Ses films marchaient très bien!». Et de se souvenir d’un épique repas où le comique amusait la galerie avec ses baguettes. «Nous emmenions toujours les acteurs faire une balade en jonque vers le village de Lei Yu Mun pour manger des fruits de mer ; une fois, s’amuse encore son collaborateur, le directeur d’UniFrance Film est tombé à l’eau en voulant aider Delphine Seyrig à débarquer!».
Des temps plus durs viennent ensuite. «Le marché du film a évolué, les directeurs de salle allaient directement et eux-mêmes chercher les films : nous perdions notre fonction de grossiste». En 1983, Pathé-Overseas est cédé à la compagnie hongkongaise EDKO; son passionné fondateur ne peut s’empêcher de rester dans les affaires encore quelques temps. «Georges repassait très souvent à Hong Kong, il adorait cette ville!». Sees deux filles, Suzanne Brepson et Isabelle Bordeaux ont également vécu plusieurs années à Hong Kong avec leurs époux. Georges Le Bigot s’est éteint en France en 1997, au terme d’une longue vie d’aventures asiatiques et de projets culturels ambitieux. Ses nombreux amis à Hong Kong et dans la région gardent en mémoire son enthousiasme, sa gentillesse et sa modestie.

FD.
Sources : Gabriel Personne, Flic et poète, Georges Le Bigot, Revue Autrement, 1986. Remerciements à M. Paul Clerc-Renaud pour le temps qu’il nous a consacré et ses précieux renseignements. Crédit photographique : archives privées. Georges Le Bigot lors d’un repas à Lei Yu Mun avec Andréa Ferréol (à droite).

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